La joie de retrouver Philippe. C’est une surprise. Il se mettra au premier rang. Stéphane, qui ne te lâchera pas du regard. Des festivaliers, inconnus, des jeunes, des couples. Beaucoup d’émotion. Des passages que je vis comme bouleversants. Depuis la veille, j’ai la sensation d’être passée de l’autre côté du miroir. Je suis dans un face à face avec le texte comme quand Bessette dit « le face à face avec un ciel aveuglant ». Plus rien n’échappe. Ou plutôt, c’est comme si je ne pouvais plus échapper au texte. Je le parle. Je ne cesse pas de le parler. C’est vertigineux. Le texte dans son imminence. Et ça a lieu en direct, au moment, là. Dans mes yeux ? Dans tes yeux. Tu me parles de plus en plus avec la flûte. C’est le sprechgesang que nous avions désiré, à Toulouse, il y a un an. Le son de la flûte est légèrement plus doux. Par moment, il suit toutes les inflexions du texte, du début à la fin d’une phrase. J’ai besoin de ces temps où nous sommes parfaitement ensemble pour développer la polyphonie de nos paroles. J’étais très ému de le réaliser, d’ainsi donner une manière d’entendre nos chemins. Philippe, qui était à la création en janvier, dit avoir vu un autre spectacle. Il parle de la façon dont notre duo vit en scène, de la relation qui n’existait pas avec tant de clarté sur le plateau, en janvier, de la fluidité. Il parle de tes larmes aussi. Coralie, la coiffeuse que j’ai vue la veille, qui a teint mes cheveux, est là. Elle dira : « j’étais envoûtée ». Jeannie, rencontrée en février, neige et verglas, à Vaison la Romaine grâce à Anne, ravie que le spectacle soit en si étroite résonnance avec l’association Les mots des livres. Le roman est au cœur de la performance. Le roman est le personnage central de la performance. Nous nous reverrons bientôt pour parler de la programmation de Grande Balade à Vaison la Romaine. Croiserons-nous Olivier Py ce soir-là à la Scierie, pour qu’il n’oublie pas Bessette, de découvrir Bessette ? Tu retrouves Renzo. Je retrouve Yvon et Mina. Le passé s’engouffre. Tennessee Williams, les Etats unis. New York. Rex Miller. Les bluesmen de Clarksdale. Le Texas. Les piscines dans les motels la nuit. Les frayeurs à Washington. Une nuit étrange dans une villa inconnue. La vie qui tourne. Les relations amoureuses qui se déplacent. Comment tout ça a pu se passer ? « Ta quête dans le théâtre nous séparait déjà ». On en parle sans épanchement, comme d’une dramaturgie possible des vies. Aucune nostalgie. Aucune sentimentalité. Une dramaturgie qui a marqué chacun de nous, et qui continue. Et ça se passe à Avignon. Place des Carmes.

23/07/2018

**********

Lire le journal complet : http://judith-productions.com/journal-davignon/