La dernière. Catherine est là avec son amie. Mathilde est là. Odile est là. De nombreuses femmes. Nathalie et Marc. Emmanuel. Emmanuel et Nathalie entendront Grande Balade depuis leur royaume d’ombre, leur cécité. Ils ne nous voient pas. Ils nous entendent. Le corps est beaucoup plus léger, beaucoup plus prêt. Tu me demandes : « qu’est-ce qui fait que ça aura été comme une seule journée ? ». Tu me réponds : « rien ne nous distrait de Bessette ». L’écriture est au centre de tout ce qu’on vit ici, et ça passe aussi par l’écriture du journal. C’est la dernière, et c’est la dernière aussi avec Clémence, à la régie. Sa présence a été généreuse. Attentive. Elle dira que c’était très riche de voir un même spectacle tant de fois, que ça lui donnait envie de créer de la lumière. Je lui demande ce qu’elle verrait. Quelque chose de plus froid. Qu’il fallait que la lumière change pendant la séquence 3 de la vie à bord. La lumière, ce sera notre prochain travail pour la tournée. J’apprends aussi que Clémence nous suit très précisément dans le texte durant tout le spectacle. Je rencontre Odile en sortant. Elle me dit : « c’est fabuleux », l’émotion plein les yeux. Elle est venue à Avignon pour ça, voir le spectacle, voir cette forme de réalisation, t’entendre, découvrir Bessette. Elle est bouleversée. L’écriture lui parle avec une acuité très particulière. Elle me voit pour la première fois comme actrice. Elle n’arrête pas de dire son émotion tout au long du spectacle. Mathilde, heureuse d’assister à cette performance dont nous avons à plusieurs reprises parlé au téléphone. Maintenant, elle met un visage sur un nom, des corps sur un texte. Et toujours ces paroles enthousiastes sur la dynamique du lien entre le texte et la musique. Catherine a lu en partie Grande Balade. Elle dit : « vous donnez de l’air à cette écriture, vous la faites respirer ». Une complicité s’installe. Nous allons discuter un long moment, d’écriture, de littérature, de vie. Pour ici, c’est fini. Autre chose commence déjà. Nous prenons le temps. Tout le temps. Mission accomplie. Et puis, ranger, dire au revoir, dédicacer un exemplaire du livre pour Clémence, qui le reçoit avec surprise et émotion. Partir. Le poids des livres, la valise de matériel. La chaleur. Le champagne, sur cette minuscule place, sous un arbre souverain, un portail de bois, des fenêtres de maisons anciennes, une table accueillante. Nous nous disons merci. Nous l’avons fait. Sans heurt, sans hâte, dans la seule nécessité de le faire. Une centaine de nouveaux lecteurs. Des livres dispersés.
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