Le tragique est une sorte de soleil. Aller comme ça dans les gouffres, c’est un rire monumental. Un rire comme la pluie. Le plus gros rire du monde. Il n’est jamais question de tristesse. Le pessimisme serait une lâcheté. Être à la mesure du réel dans ce qu’il a d’impensable. Emilie, qui se fond dans le paysage, trouve le possible. Est-ce possible ? Oui, tout l’intègre. Il n’y a plus d’opposition. Le garçon est plus jeune qu’elle. C’est possible. Ils sont séparés, et c’est possible. Ils sont sans lien, et c’est possible. Ils sont sans passé, et c’est possible. Quelque chose qui n’aurait jamais été vécu, qui ne serait pas dans la mémoire, du tout. Et lorsque tout s’anime, au rythme fou de notre contemporanéité, c’est le moment où tout le monde se rend compte que c’est possible. « Après tout ». L’aspect solaire révèle ce qui irradie, l’humain, la sensation. Un échantillon d’abondance, de vert et de bleu. Des mondes étrangers se rencontrent, d’une telle étrangeté que la voie est libre. Et pourtant elle part. Il court derrière l’auto. Il croira que c’était un mirage. Nous sommes en train d’accepter que cela se passe différemment des causes et effets que nous connaissons. Accepter la manière avec laquelle le public va venir, accepter le nombre, totalement déconcertant. L’inconnu, l’effrayant. Ça marche ça marche pas. La pure dépense s’opposant à l’investissement. On ne capitalise sur rien. Le pouvoir ne peut pas s’emparer de cela. Sans chef. Acéphale. On n’arrive pas à désigner le responsable. Alors on en fait un sujet, récurrent, insistant, préoccupant. On le diffuse autour, et surtout dans l’avant. C’est de la faute de l’avant, des autres, de ce qu’ils ont fait, des décisions qu’ils ont prises, inconséquents, ils ne sont pas sérieux, irréalistes, enfin, comment ne pas avoir pensé à ces points essentiels, pour que ça marche. Le décor, les acteurs, la pièce incontournable, l’attrape-touriste, et la clim. Sauf que le public se moque bien de la clim, s’il sait où il va. Et il sait. Dès les premiers mots. « Comme dans un rêve ». Nous nous occupons de tout. Je m’occupe de tout. À ce moment où tu as besoin de te retrouver, dans la ferveur du quotidien, alors que des corps viennent s’exprimer, en direct. Ils expriment une écoute qu’ils renvoient, un son qu’ils produisent malgré eux. Nous l’écoutons. C’est une première fois, pour eux, comme pour nous. Un positionnement dans le réel. Avant d’en sortir, chaque fois bouleversés, à la périphérie du monde et de ses artéfacts.

8/07/2018

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